Présidence française de l’Union Européenne : une formidable occasion manquée
Du 1er janvier 2022 au 30 juin 2022, la France a occupé la présidence tournante du Conseil de l’Union Européenne. Alors que l’Union Européenne a traversé la crise tant sanitaire qu’économique et sociale du Covid-19, c’était l’occasion de remettre en question les dizaines d’années de néolibéralisme qui ont mis à mal nos services publics et industrie. La France avait l’occasion historique de transformer le cours de la construction européenne, une formidable occasion qu’elle a manqué.
Macron avait annoncé un ambitieux programme pour cette présidence : réforme de l’espace Schengen, défense européenne, climat, salaire minimum et réflexion sur les institutions… Tout comme sa présidence, derrière l’idée de “progressisme” se cache encore et toujours le néolibéralisme, garant des intérêts des plus riches.
Alors que la pandémie faisait rage, nous pensions que c’était une nouvelle page de l’histoire qui s’ouvrait : celle de la remise en cause du libre-échange. Celui-là même qui a empêché la France et nombre de pays européens de produire le matériel médical, les masques ou les médicaments pourtant si nécessaires pour faire face à la pandémie.
En avril 2021, le secrétaire d’Etat Clément Beaune disait “On ne doit pas refaire l’erreur que nous avons faite en gérant mal l’après-crise de l’euro et en durcissant les règles budgétaires d’avant-crise”. Pourtant, un an plus tard, Elisabeth Borne, dans son discours devant l’Assemblée Nationale a affirmé que les français auraient à se serrer la ceinture.
Avec la guerre en Ukraine, Macron avait l’occasion de protéger de concert les peuples européens des conséquences sociales et économiques du conflit. Il aurait pu négocier, à court terme, un prix de gros pour l’achat de gaz ou de pétrole, bloquer les prix en instaurant un bras de fer avec les géants de l’énergie et en s’appuyant sur la force d’un marché de 450 millions de citoyen-nes. Au lieu de ça, il a laissé les grands groupes énergétiques tels que Total engranger un bénéfice de 17,7 milliards d’euros au premier semestre de l’année 2022, alors que leur chiffre d’affaires était de 16 milliards sur la totalité de l’année 2021.
Sur la question du gaz, Macron a troqué la dépendance au gaz russe par une dépendance au gaz de schiste américain, au gaz qatari et à l’Uranium kazakhs et nigérien. La réelle solution aurait été de recouvrer notre indépendance énergétique en taxant les profits des grands groupes et en investissant massivement dans la transition énergétique et le développement des énergies renouvelables.
Ce n’est pas la guerre seule qui a considérablement baissé le pouvoir d’achat des français, c’est le manque de régulation des grands groupes. Ce n’est pas aux français de se serrer la ceinture : il faut organiser le partage des richesses en contraignant, par la taxation, les grands groupes à partager aux citoyennes et aux citoyens les milliards de dividendes qu’ils versent chaque année à leurs actionnaires.
Macron n’a pas agi pour le climat mais bien contre lui en n’engageant pas la planification écologique, dont il avait repris les termes par pur électoralisme, vers le 100% d’énergies renouvelables. Pourtant, partout en Europe les jeunes descendent dans la rue pour le climat, partout en Europe nous observons des catastrophes liées au réchauffement climatique, lui-même 100% provoqué par l’activité humaine. Pire encore, dans sa loi pouvoir d’achat, il permet la relance du charbon et des hydrocarbures, nous éloignant toujours plus des objectifs fixés par les accords de Paris.
La fin des accords de libre-échange ? Encore une fois, Macron s’est incliné face à l’Allemagne en concluant un accord avec la Nouvelle-Zélande. La grande réflexion sur les institutions et le commerce européen n’aura eu pour seule finalité que de montrer, une fois de plus, l’incapacité de l’Union Européenne à réguler et à protéger le pouvoir d’achat des européen-nes.
Au nom de la protection de l’Etat de droit et de nos libertés fondamentales, il s’est mis en scène dans la guerre en Ukraine face à l’autocrate russe. Pourtant, dans le seul espace européen l’état de droit est menacé par la progression des nationalismes. Pire encore, Macron s’est rendu complice des crimes LGBTIphobes en Hongrie, en retardant les procédures de sanction face aux remises en cause de l’Etat de droit en Hongrie ; et a toléré que son ministre Clément Beaune se voie refuser l’accès à une zone anti-LGBTI.
Cette présidence est donc une formidable occasion manquée, pour le pouvoir d’achat des français, pour le climat, pour nos libertés fondamentales en tant qu’êtres humains et pour le leadership de la France. Alors qu’il aurait pu retarder la présidence française de l’Union Européenne, comme l’avait fait l’Allemagne en 2006, il a préféré l’utiliser à des fins électorales. Macron a transformé cette formidable occasion pour le peuple français en une grande campagne de communication n’ayant pour seuls bénéficiaires que lui et les multimilliardaires.
Je vous invite à écouter le discours de Manuel Bompard, qui est intervenu pour le groupe LFI-NUPES dans ce débat à l’Assemblée sur le bilan de la Présidence française de l’Union européenne :